Très intéressée par la relation mère/fille, Isabelle Brocard s'attache à une figure de l'histoire de la littérature française, à laquelle, jusqu'ici, le cinéma ne s'était pas intéressé ...
Désireuse de faire le pont entre la position actuelle des femmes dans la société et la question des femmes telle qu'elle se posait au XVIIe siècle, la réalisatrice s'est plongée dans les Lettres de Madame de Sévigné écrites à sa fille Madame de Grignan et s'est beaucoup appuyée sur la biographie de Roger Duchêne, considéré comme le spécialiste de l'illustre épistolière...
Tourné dans les magnifiques décors intérieurs et extérieurs des châteaux de Courances et de Grignan, le scénario nous invite au cœur des échanges entre ces deux femmes, belles, intelligentes et éminemment "modernes"...
Karin Viard incarne avec son talent habituel et sans cesse renouvelé, Marie de Rabutin-Chantal, veuve de Henri de Sévigné, tué lors d'un duel avec le chevalier d'Albret, pour les beaux yeux de sa maîtresse Madame de Gondran, amie de Madame de La Fayette et Charles de La Rochefoucauld - et mère de deux enfants : Françoise et Charles, dont contrairement aux mœurs de l'époque, elle s'occupera elle-même dès leur plus petite enfance...
Ana Girardot interprète avec un peu de maladresse à mon goût, Françoise, la fille de la Marquise, contrainte d'épouser François de Grignan, un homme beaucoup plus âgé qu'elle, pour des raisons que vous redécouvrirez dans le récit... avec lequel elle aura trois enfants...
Au-delà de l'intérêt historique, c'est l'emprise exercée par cette mère possessive sur la destinée de sa fille qui intéresse la cinéaste : comment rivaliser avec cette femme de lettres indépendante qui brille dans les salons parisiens auprès des plus beaux esprits, lorsque l'on est une jeune femme fatiguée par des grossesses à répétition et exilée en province dans un mariage où l'argent manque cruellement ?
Si le débat et la mise en perspective sont intéressants, je trouve que le film pêche par un défaut de casting en la personne d'Ana Girardot (que j'avais adorée dans Ce qui nous lie en 2017), dont le visage et l'allure très contemporains siéent mal à cette époque...